Le don empoisonné de la folie
Edition Fayard/Mazarine - 324 pages.
Présentation de l’éditeur :Lucía a eu une jeunesse tumultueuse et a beaucoup essayé, dans tous les domaines. Elle dit avoir dépensé chez les psys de quoi s’acheter une Porsche. Finalement, sa famille et elle-même se convainquent qu’elle est folle. Jusqu’au jour où elle découvre, à 48 ans, qu’elle est zèbre, c’est-à-dire qu’elle fait partie des 0,5 % de personnes dotées d’un QI supérieur à 140. Quand on est zèbre, on est hypersensible – aux situations, aux personnes, mais aussi aux bruits, aux odeurs… –, ce qui est un don, mais aussi une souffrance. Surtout quand on aime.
Ce texte aurait pu s’appeler La Vie sexuelle de Lucía E. Mais « ça n’a jamais ressemblé à un film porno », dit-elle. Il y a dans ce récit quelque chose d’un journal intime à la sincérité sans fard.
C’est l’histoire d’une femme de sa génération dans un monde désenchanté, une femme très libre, à fleur de peau, qui ne ment pas, ni à elle-même ni à son lecteur.
Mon avis :Je n’avais pas lu d’oeuvre de Lucia Etxebarria depuis longtemps et ce livre fut pour moi l’occasion de redécouvrir cette auteur. Il est différent, puisqu’il est écrit directement en français, corrigé ensuite, et non destiné à un public hispanisant – un peu comme si une auteur française connue écrivant en castillan.
Ce texte a été écrit à la suite du procès qui a failli lui faire perdre la garde de sa fille parce que son père était considéré comme « plus stable ».
Chronologie bouleversée ? Lucia raconte trois ans de sa vie, de ses amours. Ils (pluriel qui englobe aussi bien des hommes que des femmes) ne sont pas désignés nommément mais par des périphrases qui indiquent une caractéristique de ces personnages (l’homme à la moto orange, l’homme qui allait sauver la Catalogne). Volonté de préserver leur anonymat ? Désir de montrer qu’aucun d’entre eux ne lui a apporté ce qu’elle désirait vraiment, c’est à dire une relation amoureuse stable ?
Ce récit est assez souvent cru : les mots choisis sont toujours très précis, et parfois dérangeants, un peu comme si une personne vous faisait des confidences intimes alors qu’on n’en demandait pas tant. Ou plutôt, on ne pensait pas que l’auteur irait aussi loin dans les confidences, la narratrice (j’ai peine à dire « Lucia ») ne se fait pas de cadeaux à elle même, et si elle est lucide envers elle-même, elle ne craint pas d’affronter le regard des autres et de se livre âme et corps.
Il est cependant une personne sur laquelle Lucia veille toujours, et loue les qualités, la sensibilité, tout en prévoyant un avenir difficile à cause de cette même sensibilité : sa fille. Lira-t-elle ce témoignage maternelle une fois adulte ? Je n’en sais rien, ce dont je suis sûre en refermant ce livre montre aussi et surtout l’amour d’une mère envers sa fille.