InfrarougeRoman308 pages édité chez Acte Sud en mai 2010
RésuméArtiste
et reporter-photographe, Rena Greenblatt rejoint à Florence son père
Simon et sa belle-mère Ingrid pour une semaine de promenades parmi les
splendeurs de la Renaissance. Mais l'idylle n'est pas au rendez-vous.
Naguère scientifique brillant, Simon est désormais un homme fatigué à
l'élocution hésitante, et sa femme - solide nature batave - semble peu
réceptive aux chefs-d'oeuvre toscans. Le couple parental traîne la
patte. Et Rena, toute au regret de Paris et de son jeune amant Aziz,
s'impatiente. Alors lui viennent quantité de souvenirs, fantasmes et
pensées secrètes qu'elle ne petit partager qu'avec Subra, son "amie
spéciale", son double, son invisible confidente. Seule Subra sait à
quels infrarouges réagit Rena : désir et déchirements de la maternité,
beauté et liberté du sexe, émotion devant les corps masculins
débarrassés de leurs oripeaux machistes, et que Rena adore photographier
dans l'abandon de la jouissance... Des chapitres vifs et brefs mêlent
présent et passé, révoltes en banlieue parisienne (on est en octobre
2005) et insurrection intime, retours du refoulé - l'enfance émerveillée
et endolorie, l'adolescence saccagée - et mirages de la clairvoyance.
Ainsi, infrarouge raconte deux voyages : celui, désopilant, de vacances
ratées, et celui, plus sombre et passionné, qui explore les liens et les
conflits familiaux, les codes féminin et masculin, les archétypes
trompeurs et les vérités inavouées.
Biographie de l'auteur : Née à
Calgary (Canada), Nancy Huston, qui vit à Paris, a publié de nombreux
romans et essais chez Actes Sud et chez Leméac, parmi lesquels
Instruments des ténèbres (1996, prix Goncourt des lycéens et prix du
Livre Inter), L'Empreinte de l'ange (1998, grand prix des Lectrices de
Elle), Lignes de faille (2006, prix Femina), Passions d'Annie Leclerc
(2007) et L'Espèce fabulatrice (2008).
Mon ressenti C’est
un livre à tiroir qui se lit à plusieurs niveaux avec des histoires
dans l’histoire. J’ai mis du temps à me dire mais où est-ce qu’elle veut
en venir ou qu’est-ce que c’est cette construction.
C’est un
livre a plus d’un titre déconcertant et qui vous accroche, qui chamboule
et entrechoque les sentiments que vous ressentez à sa lecture. Il ne
vous laisse pas indifférent. Puis, quand j’ai compris comment l’histoire
est racontée, je me suis laissée porter par l’histoire.
Quand
je lis un livre, j’aime voir l’histoire se dérouler, se construire au
fur et à mesure… Dans ce cas, j’ai suivi l’introspection de l’héroïne et
donc en fonction de ce que la réalité lui donnait à comprendre, il y
avait une digression et elle m’offrait alors ses pensées intimes, très
intimes…
Un voyage à Florence qu’elle offre à son père, et j’ai
redécouvert Florence pour mon plus grand plaisir. Plaisir, c’est de cela
dont il est question… plaisir des yeux (peinture, musées, mais aussi la
photo qui tient une place particulière et importante) plaisir des sens
(rencontres érotiques, mélange des corps), plaisir du toucher, plaisir
de l’odorat (parfum du cuisine, mais des corps aussi…), plaisir du goût
(la cuisine, le corps de l’autre)… Dans le dédale de ses rues, il y a
toujours un trésor à découvrir, des couleurs à s’approprier, une
rencontre à faire…
Comme toujours chez Nancy, l’écriture et les
sentiments sont forts : plongée dans un univers de sensualité,
érotique très intense, je me suis trouvée en osmose parfois avec ce que
rencontrait l’héroïne face à ses doutes, à ses attentes, à son devenir…
C’est un voyage au travers de sa propre vie.
C’est aussi un bel
hommage aux hommes, au travers de ce livre, les hommes si ils sont mis à
nu ou mis en image, ont la part belle. Ils font partis intégrantes de
notre vie, la complémentarité de notre univers féminin. J’ai adoré ces
descriptions de ces corps abandonné dans l’extase ou le repos, la
séduction des corps, le désir, le plaisir…. Ces bouts de chemins que
nous faisons ensemble.
Comme toujours dans l’œuvre de Nancy, la
question de la mère est posée que faisons nous à nos fils pour qu’ils se
muent un jour en assassins ? La filiation ? question obsédante qui
revient souvent dans le portrait de certains personnages masculins
devenus hommes ou celui de ce frère… C’est la relation sœur et frère qui
m’a mis très très mal à l’aise, avec des questions autour de la
torture, des traumatismes, la découverte de son corps à quel prix ? pas
toujours simple pour moi à ce moment d’être en phase.
Autre
vision : les émeutes en France de 2005, comment au travers de ces
évènements les hommes se situent. C’est aussi un regard sur le
vieillissement des corps… notre relation à notre corps et son
dépérissement.
Sous sa plume, Nancy nous fait vivre un
feuilleton tragi-comique de vacances ratées, elle nous emmène dans les
replis de l’âme et du temps. C’est un merveilleux bouquin, que je
relirai certainement. JE suis qu’en vieillissant encore un peu, je
n’aurai pas le même regard.
Une grande dame Nancy, un grand coup de cœur.
A découvrir absolument.