Titre : Disparition à la chaine.
Auteur : Ake Smeberg
Editeur : Points
Nombre de pages : 279
polar suédois
Mon résumé :
Dans le nord de la Suède, des villageois sont sauvagement agressés par un inconnu, qui abandonne un sac en plastique. A l’intérieur, des restes humains. Serait-ce ceux d’Anna-Greta Sjöden, disparue trente ans plus tôt ? Il y a prescription pour la justice, mais pas pour le journaliste John Nielsen, fascinée par cette affaire – et par toutes les affaires de disparition. Très vite, deux autres corps sont retrouvés, datant à peu près de la même période. Un tueur en série sévirait-il dans la région ?
Mon avis :
Ce roman marque la fin de ma « panne de lecture », du moins, je l’espère. Je l’ai lu très rapidement, tant j’avais hâte de connaître le dénouement de cette histoire.
La narration alterne deux points de vue : le tueur et le journaliste-enquêteur. Bien sûr, nous ignorons l’identité du tueur, nous connaissons juste ses méthodes, ses obsessions, ses accès de colère. Il tranche avec les tueurs en série habituels car il ne tue pas pour satisfaire une pulsion – il est très capable de se maîtriser, parfois – il tue méthodiquement, quand il ne peut pas faire autrement – et si ses complices avaient été à la hauteur de son intelligence, plusieurs meurtres auraient été évités. Oui, ce tueur m’est presque sympathique, jusque dans son mépris affiché pour la police, qui n’a même pas été capable de retrouver tous les corps et dans son talent de manipulateur.
Son adversaire n’est pas non plus un personnage qui laisse indifférent. Comme le tueur, John Nielsen a un passé douloureux, qui le mène à s’intéresser plus particulièrement aux disparitions. Son seul compagnon est son vieux chien Tjarrko. Sujet à des phases de dépression profonde, il noie sa désespérance dans l’alcool, jusqu’à s’y abimer entièrement. Il a fallu que l’affaire Anna Sjöden resurgisse pour qu’il remonte à la surface. L'habilité de la narration tient à sa manière de ne pas délivrer d'entrée de jeu toutes les informations au sujet de Nielsen. Deux d'entre elles sonnent comme des coups de théâtre, et il serait dommage, comme le fait le quatrième de couverture, de révéler l'une d'entre elles.
Remuer le passé n’apporte rien de bon, ce sera le leitmotiv du roman. Nielsen peut déjà constater par lui-même à quel point les suspicions du passé ont laissé des séquelles dans le présent. Il peut aussi constater à quel point les enquêteurs ont pu manquer de curiosité, et se reposer sur des certitudes. Un seul exemple suffira : peu avant la disparition d’Anna-Greta, une maison a explosé non loin de là, tuant une famille entière. Bien sûr, l’explosion était accidentelle. Bien sûr, personne n’a survécu – qu’espériez-vous retrouver après une telle explosion ? Même la présence fantomatique de Kaj et Désirée, les jumeaux, proches camarades d’Anna-Greta, n’étonnera pas réellement – les fantômes existent, qu’on soit saoul ou pas. En se replongeant dans cette affaire-ci, ce ne sont pas que des fantômes que Nielsen inquiétera.
Duel entre un tueur qui oscille entre volonté de poursuivre sa route et envie d'être découvert et un journaliste hanté par ses démons intérieurs, Disparition à la chaîne est un très bon polar suédois, dans la lignée de Sjöwall et Wahlöö.