Parle-moi du sous-sol.
Edition Fayard - 214 pages.
Présentation de l’éditeur :
La fable prétend que le travail est un trésor. Mais pour certains, il est seulement alimentaire. Ils sont nombreux, les employés surqualifiés de ce grand magasin de luxe, à enchaîner les contrats d’une semaine. Comme ce démonstrateur de karaoké spécialiste de Baudelaire. Ou cet ancien militaire, embauché comme vigile juste avant Noël pour éviter un attentat au rayon jouets. Caissière depuis peu au niveau – 1 avec un bac + 7, la narratrice ne serait-elle pas en droit d’espérer mieux ?
Mon avis :
Depuis quelques années, les romanciers ont la fibre réaliste. Ce n’est pas Au bonheur des dames d’Emile Zola, nul Octave ne viendra arracher la jeune vendeuse à son comptoir, non, c’est le quotidien de jeunes étudiants qui ont accepté un travail alimentaire (comme son nom l’indique, il faut bien manger). Le problème (majeur) de ce travail alimentaire est qu’il empêche l’étudiante de se consacrer à ses études, à sa thèse, et que ses nombreuses années d’étude ne lui servent pas à grand chose. En revanche, elle apprend le maniement d’une caisse, l’utilisation de la machine à carte bleue, comment repérer le client insolvable qui vous présente un gros chèque, ou comment remplacer au pied levé un collègue fugueur.
Je cherche en vain à m’émouvoir sur le destin de la narratrice. Je constate cependant que, depuis quarante ans, rien n’a changé : c’est la jeune femme qui travaille, paie le loyer et les courses, c’est son compagnon, grand acteur en devenir et incompris, qui se laisse entretenir, pour rentrer finalement chez papa/maman. Oui, le style est impeccable, oui, les allusions littéraires sont nombreuses, tout comme les remarques méprisantes subies par les employés (dire que « caissière » était considéré comme un métier susceptible de faire rêver les petites filles dans mon manuel de lecture CP !). Oui, le cadre est réaliste, presque trop, puisque je pense qu’il ne me faudrait que peu d’efforts pour identifier ce temple du commerce, situé non loin de la chapelle Notre-Dame-de-la-Médaille-Miraculeuse. Mais… il ne se passe rien, si ce n’est la résignation de tous, et une brève tentative pour se sortir de là. Je n’ai garde d’oublier la naïveté des sommités universitaires croisées au détour d’un rayon, ou leur amnésie providentielle. Les jeunes sont exploités – et que sont devenus les stagiaires qui protestaient tant, il y a encore quelques années ? Sont-ils toujours stagiaires ou ont-ils enfin un CDI ?
Au final, le souvenir de cette lecture s’estompe déjà, alors que je ne l’ai terminé qu’hier. Ne ressentir que de l’indifférence et avoir hâte de terminer cette chronique ne sont pas des points très positifs en sa faveur. A vous de voir et de lire si vous avez envie de vous laisser tenter.