La supplication.
Edition J'ai lu - 250 pages.
Présentation de l'éditeur :
"Des bribes de conversations me reviennent en mémoire... Quelqu'un m'exhorte :
- Vous ne devez pas oublier que ce n'est plus votre mari, l'homme aimé qui se trouve devant vous, mais un objet radioactif avec un fort coefficient de contamination. Vous n'êtes pas suicidaire. Prenez-vous en main !"
Tchernobyl. Ce mot évoque dorénavant une catastrophe écologique majeure. Mais que savons-nous du drame humain, quotidien, qui a suivi l'explosion de la centrale nucléaire ?
Svetlana Alexievitch nous fait entrevoir un monde bouleversant : celui des survivants, à qui elle cède la parole. L'évènement prend alors une toute autre dimension.
Pour la première fois, écoutons les voix suppliciées de Tchernobyl.
Mon avis :
Ce livre fait partie de ceux qui font dire à mes proches "allons, Nina, sois raisonnable : lis quelque chose de joyeux !" Certes. Il est cependant des livres nécessaires, comme Notes sur Hiroshima d'Oe, Fukushima de Michael Ferrier pour nous rappeler que l'homme est capable du pire et du meilleur.
Le meilleur, ce sont ces hommes qui se sont sacrifiés pour d'autres. Ce livre est pour rappeler qui ils étaient avant, et comment ils ont été emportés. Ce livre est pour leur proche, aussi, qui furent les victimes elles aussi de cette catastrophe. Pour tous ceux qui ont été déplacés, pour tous les animaux qui ont été tués par "mesure de sécurité" alors que les mesures de sécurité n'avaient pas été prises.
Un des témoins aurait aimé que la catastrophe ait lieu dans un pays d'Europe, parce que les autorités n'auraient pas agi ainsi. J'ai la faiblesse de croire aussi que l'on aurait pas envoyé des pompiers sans aucune protection, que l'on aurait pas dit aux populations locales qu'il s'agissait d'un simple incendie ou que l'on aurait mieux pris en charge les proches, les villageois. Le pire est là, dans la souffrance, physique, psychologique des survivants, qui se demandent s'ils ont le droit de s'aimer, d'avoir un enfant qui risque d'être malformé, malade. Pas de soin aux pays : les enfants sont soignés à l'étranger.
Le pire est que la Biélorussie, la Russie blanche, est un pays déjà dévasté par les guerres précédentes, un pays où des réfugiés fuyaient les combats qui avaient lieu à l'autre bout de la Russie, dont la barbarie n'avait d'égal que celle des nazis lors de la seconde guerre mondiale. Ce pays semble avoir tellement souffert que certains habitants semblent résignés. Dans ce pays marqué par le communisme, je ne pensais pas non plus que la religion avait un poids aussi fort, aussi culpabilisante auprès des populations.
La grande force de l'auteur est de s'effacer totalement derrière les voix des personnes interrogés. C'est son sujet qui est important, pas elle.
La supplication, ou la voix des survivants.