Titre : Les ombres de Montelupo
éditions Agullo - Nombre de pages : 310 pages.
Présentation de l’éditeur :
C’est l’automne à Parme. Le commissaire Soneri décide d’échapper à la grisaille de la ville en retournant dans son village natal des Apennins pour des vacances bien méritées. Il se réjouit à l’idée de cueillir des champignons sur les pentes boisées de Montelupo, une activité jadis partagée avec son père. Sur le village isolé règne la famille Rodolfi, producteurs de charcuterie depuis des générations. Le patriarche, Palmiro, mène sa barque d’une main sûre. Mais derrière la réussite, se profile un drame familial : le fils, Paride, a d’autres projets pour son avenir..
Mon avis :
J’ai lu les trois tomes qui mettent en scène le commissaire Soneri, cependant je commence par chroniquer le troisième tome, le dernier lu en date.
Je suis charmée par cet enquêteur que je qualifierai « d’à l’ancienne ». Oui, il y a des meurtres. Oui, ils sont parfois violents, sanglants, parce qu’un assassinat n’est pas un acte anodin. Oui, les détails sont parfois sordides, parce qu’un cadavre et ses blessures sont tout sauf ragoutant et qu’il faut montrer cette réalité de la mort. Mais, l’auteur ne perd pas son temps en se complaisant par le récit circonstancié et détaillé des meurtres, il nous épargne de longues scènes d’autopsie, qui n’apportent rien à l’identification des causes de la mort (une ligne ou deux suffisent, ne l’oublions pas). Soneri agit comme il l’entend, dit ce qu’il pense, poliment, posément, lucide à la fois sur lui-même et sur les autres.
Ces vacances, pour lui, c’était un retour aux sources, dans un village où il a grandi avant que sa famille ne parte pour la ville, pour que sa mère reçoive des soins appropriés. Il est accueilli non pas comme un enfant du pays, mais comme un étranger, un policier étranger à qui l’on ose pas se confier, à qui l’on ne dit surtout pas ce qui se passe. Lui qui n’aspirait qu’au repos et à la cueillette des champignons, il se voit plonger dans une affaire qu’il n’avait pas du tout envie de connaître. Chaque étape de ce récit est un adieu à une partie de son enfance, esquissant une rupture définitive avec son passé. En contrepoint, la voix d’Angela, la femme qu’il aime et désire, qui se montre lucide sur ce qu’il lui dit, sur ce qui se passe aussi.
Le passé… Il est bien présent dans cette enquête, il est, comme souvent, cause de bien des choses : avec le commissaire, nous retournons aux années de guerre, et d’après guerre, à ses clans, ses rivalités, qui ne se sont pas effacés avec le temps et dont les résonances continuent encore. Ils étaient trois, à l’époque. Deux ont choisi l’argent. Le troisième, surnommé le Maquisard, est le seul à avoir mené une vie sans chercher à posséder – et les scènes où il apparaît semblent autant de baroud d’honneur face au destin.
A l’époque de la mondialisation, on oublie comme un village peut parfois être dépendant d’une seule et unique famille, celle qui, créatrice et propriétaire de l’usine locale, donne du travail à tout le monde ou presque. Le seul choix pour garder un peu d’indépendance est de partir – ce que font certains jeunes, ce qu’a fait, en son temps, le père du commissaire.
Il ne s’agit pas tant de montrer les magouilles des industriels, des banques et autres financiers, mais leur impact sur la vie de ces êtres ordinaires, de ce qui se sont crus plus forts, ou qui ont voulu tirer un bénéfice substantiel.
Une enquête qui prend son temps, qui prend le temps d’être racontée. Cela fait du bien.