Feu pour feu
Edition Métailié - 336 pages.
Présentation de l’éditeur :
À Lagos, paradis des embouteillages, un jet privé s’écrase sur une résidence dans le quartier des vieilles fortunes avec à son bord le principal candidat au poste de gouverneur. Aussitôt, on lui trouve un remplaçant, assuré d’être élu : chief Ojo.
La séduisante Amaka, l’avocate des femmes, se révolte : chief Ojo est son ennemi juré, un salaud fini, avec un goût prononcé pour les très jeunes filles et quelques cadavres dans le placard. Elle a les moyens de le faire tomber. Et assez d’astuce pour jouer avec des filous et, malgré les pièges mortels, retourner contre eux leurs propres stratagèmes.
De l’action, de la rouerie, du suspense. Des descriptions impressionnantes des marchés de Lagos, des élections truquées, des chantages, des lyncheurs et des voleurs, mais aussi des gens honnêtes qui ne se laissent pas faire. Une intrigue menée à bride abattue, entre ethnologie et polar, qui vient fouiller les dessous peu reluisants de la société nigériane sans jamais perdre le sens de l’humour.
Mon avis :
Tout d’abord, je tiens à dire que vous pouvez lire ce roman noir, qui se concentre plus particulièrement sur Amanka sans avoir lu le précédent ouvrage de Leye Adenle – même si c’est là que nous faisons la connaissance de Florentine, de Guy, l’absent-présent de ce volume, ou encore d’Ibrahim.
Nous sommes à Lagos, la plus grande ville du Nigéria, et tout donne l’impression de partir dans tous les sens possibles et imaginables. Il faut dire que deux scènes chocs ouvrent le roman. D’un côté, nous avons Douglas et sa… j’hésite sur le nom à donner : maîtresse ? call girl qu’il a mis à son bras ? montent dans un jet privé. Cela prouve déjà que le candidat et son parti ne manquent pas de moyens. Ce qui n’était pas prévu, en revanche, est que le pilote soit le fiancé de la jeune femme. Oui, le fiancé. Non, ce n’est pas une erreur. Par contre, s’en est une pour le futur gouverneur, puisque le pilote écrase l’avion sur la maison du gouverneur. Accident ? Pas vraiment.
L’autre scène choc est un lynchage que personne ne parvient à empêcher : un jeune homme, accusé de vol, est brûlé vif, et Amaka, qui se portait à son secours, manque de se faire tuer elle aussi. Elle ne saura que plus tard à qui elle doit son salut. Il n’empêche : Ibrahim, prévenu, viendra sur les lieux. Il est de la police, mieux, il est l’un des rares policiers intègres qui soient, lui et ceux qui pensent comme lui paient hélas souvent un lourd tribu à la corruption.
Et pendant ce temps, il faut bien trouver un nouveau candidat au poste de gouverneur, un candidat qui sera forcément élu, son parti a les moyens financiers pour cela. Ce sera chief Ojo. Je ne dirai pas « à sa grande joie » mais presque : chief Ojo est en délicatesse avec sa femme, qui a reçu des photos compromettantes, et il ne s’attendait pas à ce que son beau-père tout puissant, qui ne lui a jamais vraiment accordé les faveurs qu’il souhaitait, lui offre ce poste maintenant qu’il sait qu’il trompe sa fille unique. Seulement, Ojo n’est pas un personnage sympathique, et quiconque se met sur sa route finira mort et enterré, à plus fortes raisons s’il s’agit d’une jeune femme : les femmes ne sont là que pour satisfaire ses désirs. Il les aime jeunes, il apprécie même les enfants, ce qui ne dérange pas du tout Malik, fournisseur officiel de chair fraîche pour qui en veut. Autant dire que le combat d’Amaka contre lui semble perdu d’avance. Même si elle est fille d’ambassadeur. Même si elle a des protections. Même si pas grand chose ne lui fait peur. Il faut dire aussi que cette protectrice des filles des rues (voir Lagos lady) est une des rares femmes à se comporter ainsi, une des rares que l’on croise. Rare sont celles qui ont le courage de témoigner, ou de rompre le cycle infernal dans lequel elles se sont engagé – le rompre, dénoncer, c’est risquer la mort.
Alors… cette lecture est sanglante, violente, elle est intranquille parce que tout ou presque peut arriver. Les personnes fiables sont rares, et Amanka elle-même, parfois, baisse les bras – avant de se rendre à quel point, parfois l’on peut se tromper sur une personne ou sur ses intentions. La jeune femme, pourtant, va au bout du bout des choses, et les actes qu’elle commet, dans un pays qui semble miné par la corruption, où les urnes se bourrent et les votes s’achètent, sont peu à l’échelle de ce qui se déroule. Il est toujours quelqu’un pour appeler et demander un service, et une autre personne au bout du fil pour le rendre ou contacter quelqu’un qui peut le rendre – et tant pis s’il s’agit d’enlever, de tuer, ou de neutraliser quelqu’un, même de son propre camp. Quant au titre, il prend tout son sens entre le début et la fin du roman.
Edition Métailié - 336 pages.
Présentation de l’éditeur :
À Lagos, paradis des embouteillages, un jet privé s’écrase sur une résidence dans le quartier des vieilles fortunes avec à son bord le principal candidat au poste de gouverneur. Aussitôt, on lui trouve un remplaçant, assuré d’être élu : chief Ojo.
La séduisante Amaka, l’avocate des femmes, se révolte : chief Ojo est son ennemi juré, un salaud fini, avec un goût prononcé pour les très jeunes filles et quelques cadavres dans le placard. Elle a les moyens de le faire tomber. Et assez d’astuce pour jouer avec des filous et, malgré les pièges mortels, retourner contre eux leurs propres stratagèmes.
De l’action, de la rouerie, du suspense. Des descriptions impressionnantes des marchés de Lagos, des élections truquées, des chantages, des lyncheurs et des voleurs, mais aussi des gens honnêtes qui ne se laissent pas faire. Une intrigue menée à bride abattue, entre ethnologie et polar, qui vient fouiller les dessous peu reluisants de la société nigériane sans jamais perdre le sens de l’humour.
Mon avis :
Tout d’abord, je tiens à dire que vous pouvez lire ce roman noir, qui se concentre plus particulièrement sur Amanka sans avoir lu le précédent ouvrage de Leye Adenle – même si c’est là que nous faisons la connaissance de Florentine, de Guy, l’absent-présent de ce volume, ou encore d’Ibrahim.
Nous sommes à Lagos, la plus grande ville du Nigéria, et tout donne l’impression de partir dans tous les sens possibles et imaginables. Il faut dire que deux scènes chocs ouvrent le roman. D’un côté, nous avons Douglas et sa… j’hésite sur le nom à donner : maîtresse ? call girl qu’il a mis à son bras ? montent dans un jet privé. Cela prouve déjà que le candidat et son parti ne manquent pas de moyens. Ce qui n’était pas prévu, en revanche, est que le pilote soit le fiancé de la jeune femme. Oui, le fiancé. Non, ce n’est pas une erreur. Par contre, s’en est une pour le futur gouverneur, puisque le pilote écrase l’avion sur la maison du gouverneur. Accident ? Pas vraiment.
L’autre scène choc est un lynchage que personne ne parvient à empêcher : un jeune homme, accusé de vol, est brûlé vif, et Amaka, qui se portait à son secours, manque de se faire tuer elle aussi. Elle ne saura que plus tard à qui elle doit son salut. Il n’empêche : Ibrahim, prévenu, viendra sur les lieux. Il est de la police, mieux, il est l’un des rares policiers intègres qui soient, lui et ceux qui pensent comme lui paient hélas souvent un lourd tribu à la corruption.
Et pendant ce temps, il faut bien trouver un nouveau candidat au poste de gouverneur, un candidat qui sera forcément élu, son parti a les moyens financiers pour cela. Ce sera chief Ojo. Je ne dirai pas « à sa grande joie » mais presque : chief Ojo est en délicatesse avec sa femme, qui a reçu des photos compromettantes, et il ne s’attendait pas à ce que son beau-père tout puissant, qui ne lui a jamais vraiment accordé les faveurs qu’il souhaitait, lui offre ce poste maintenant qu’il sait qu’il trompe sa fille unique. Seulement, Ojo n’est pas un personnage sympathique, et quiconque se met sur sa route finira mort et enterré, à plus fortes raisons s’il s’agit d’une jeune femme : les femmes ne sont là que pour satisfaire ses désirs. Il les aime jeunes, il apprécie même les enfants, ce qui ne dérange pas du tout Malik, fournisseur officiel de chair fraîche pour qui en veut. Autant dire que le combat d’Amaka contre lui semble perdu d’avance. Même si elle est fille d’ambassadeur. Même si elle a des protections. Même si pas grand chose ne lui fait peur. Il faut dire aussi que cette protectrice des filles des rues (voir Lagos lady) est une des rares femmes à se comporter ainsi, une des rares que l’on croise. Rare sont celles qui ont le courage de témoigner, ou de rompre le cycle infernal dans lequel elles se sont engagé – le rompre, dénoncer, c’est risquer la mort.
Alors… cette lecture est sanglante, violente, elle est intranquille parce que tout ou presque peut arriver. Les personnes fiables sont rares, et Amanka elle-même, parfois, baisse les bras – avant de se rendre à quel point, parfois l’on peut se tromper sur une personne ou sur ses intentions. La jeune femme, pourtant, va au bout du bout des choses, et les actes qu’elle commet, dans un pays qui semble miné par la corruption, où les urnes se bourrent et les votes s’achètent, sont peu à l’échelle de ce qui se déroule. Il est toujours quelqu’un pour appeler et demander un service, et une autre personne au bout du fil pour le rendre ou contacter quelqu’un qui peut le rendre – et tant pis s’il s’agit d’enlever, de tuer, ou de neutraliser quelqu’un, même de son propre camp. Quant au titre, il prend tout son sens entre le début et la fin du roman.