A L'ENFANT QUE JE N'AURAI JAMAIS
Lettre
66 pages édité aux éditions Nil en août 2011
Résumé
L'essai d'Elisabeth Badinter intitulé Le Conflit soulignait, l'an passé, la dureté de l'injonction faite aux femmes par l'obligation non seulement d'être mères, mais de l'être absolument, dans un fantasme de perfection typique d'une société où la sphère privée est devenue un spectacle permanent. En écrivant à l'enfant qu'elle a choisi de ne jamais concevoir, Linda Lê s'affranchit du monde en général pour poser un regard strictement personnel sur sa volonté de ne pas devenir mère. Ce travail autobiographique lui permet d'éclairer les premiers jalons qui, dans l'enfance, préparent l'expression de sa liberté d'adulte. La figure étouffante de la mère et une adolescence passée dans un monde exclusivement féminin contribuent à forger un désir de soi, aussi évident que douloureux à porter dans le regard de l'autre, et plus particulièrement de cet homme, S. Car l'homme qu'elle aime veut avoir des enfants. Chaque jour il tente de lui montrer que son refus se fonde sur l'erreur : erreur d'analyse, trop intellectuelle ; erreur ontologique d'un égocentrisme qui aurait mal tourné ; erreur personnelle, d'une peur jamais confrontée, etc. La narratrice, elle, en lieu et place d'idées toutes faites, voit défiler de simples images, précises et palpables : celle d'un enfant qu'elle ne saurait pas aimer, quelle que soit son identité, et celle d'un écrivain qui perdrait forcément la sienne à l'éduquer. "On ne part pas à la conquête du Graal avec une poussette", écrivait Karen Blixen. Et là où l'expression de la liberté devient intolérable aux yeux des notaires de ce monde exigeant une conversion systématique au modèle de la famille, la narratrice écarte toute forme de dureté, toute prétention à une règle édifiée à d'autres qu'elle-même. Bien au contraire, c'est toute la douceur de son amour qu'elle offre à cet enfant qui n'existera jamais, mais vit sans cesse, à chaque seconde, dans l'imaginaire lumineux de sa conceptrice.
Biographie de l'auteur
Le prix Wepler, décerné l'an dernier à Cronos, a sans doute contribué à mieux faire connaître Linda Lê, l'un de nos plus grands écrivains vivants, que sa discrétion a conduite à bâtir une œuvre monumentale loin des médias. Originaire de Dalat, au Vietnam, Linda Lê éprouve depuis toujours un amour infini pour la langue française et la littérature. Dès Les Evangiles du crime (1992), l'originalité de son style se déploie pour associer une sorte de lucidité immédiate, une vérité rigoureuse et une élégance verbale qui n'appartiennent qu'à elle. Dans chaque roman de Linda Lê se met en scène un combat, personnel ou imaginaire (Les Trois Parques, Les Aubes, Lettre morte), où la sérénité de l'écriture contraste avec la brutalité de la situation. La puissance de son analyse la campe résolument dans le monde contemporain alors que ses intrigues, ses personnages et sa mythologie héritent clairement de sa passion pour la littérature de l'âge classique. Animée d'une liberté intransigeante, Linda Lê aura peu à peu tissé son univers où les thèmes de l'amour et de la mort (In Memoriam) et de la prise de pouvoir (Cronos) se retrouvent ainsi, culminants, dans À l'enfant que je n'aurai pas. Abondamment traduite en anglais, en néerlandais et en portugais, son œuvre a été publiée quasi intégralement par les Editions Christian Bourgois, dont elle est sans nul doute la figure de proue de la littérature française contemporaine.
Mon ressenti
Une très joli lettre adressée à cet enfant qui ne sera pas, faite de tendresse, d’amour que l’auteur nous livre. Linda explique son choix et pourquoi elle n’aura pas d’enfant. Notre société formate nos comportements, une femme qui ne veut pas d’enfant renvoie forcément un truc de l’ordre du pas normal : ne dit on pas que la femme devient plus épanouie ou qu’elle est une vraie femme depuis qu’elle est devenue mère ! … Ce sentiment quand on ne fait pas comme tout le monde, de devoir se justifier face à une décision… et si on devait expliquer les raisons qui ont fait que nous avons des enfants (en enlevant le fameux « j’aime les enfants ») ou pourquoi je suis hétéro et non homo, beaucoup d’entre nous serions bien embêté…
J’ai été touchée par cette lettre : par ses mots, son questionnement, sa remise en cause, son besoin de s’expliquer, la profondeur de ses mots. J’ai été troublée aussi par le fait de la présence / absence de cet enfant… Il est rendu tellement vivant alors qu’il n’existe pas et n’existera pas : une réflexion sincère sur la liberté et l'amour, le couple et l’intime.
A découvrir absolument
Une collection que je ne connaissais pas et j’ai acheté ce livre à cause de la phrase qui présente cette collection : "Quand tout a été dit sans qu'il soit possible de tourner la page, écrire à l'autre devient la seule issue. Mais passer à l'acte est risqué. Ainsi, après avoir rédigé sa Lettre au père, Kafka avait préféré la ranger dans un tiroir. Écrire une lettre, une seule, c'est s'offrir le point final, s'affranchir d'une vieille histoire. La collection « Les Affranchis » fait donc cette demande à ses auteurs : « Écrivez la lettre que vous n'avez jamais écrite. »"
Je trouve que c’est une très belle idée.
Lettre
66 pages édité aux éditions Nil en août 2011
Résumé
L'essai d'Elisabeth Badinter intitulé Le Conflit soulignait, l'an passé, la dureté de l'injonction faite aux femmes par l'obligation non seulement d'être mères, mais de l'être absolument, dans un fantasme de perfection typique d'une société où la sphère privée est devenue un spectacle permanent. En écrivant à l'enfant qu'elle a choisi de ne jamais concevoir, Linda Lê s'affranchit du monde en général pour poser un regard strictement personnel sur sa volonté de ne pas devenir mère. Ce travail autobiographique lui permet d'éclairer les premiers jalons qui, dans l'enfance, préparent l'expression de sa liberté d'adulte. La figure étouffante de la mère et une adolescence passée dans un monde exclusivement féminin contribuent à forger un désir de soi, aussi évident que douloureux à porter dans le regard de l'autre, et plus particulièrement de cet homme, S. Car l'homme qu'elle aime veut avoir des enfants. Chaque jour il tente de lui montrer que son refus se fonde sur l'erreur : erreur d'analyse, trop intellectuelle ; erreur ontologique d'un égocentrisme qui aurait mal tourné ; erreur personnelle, d'une peur jamais confrontée, etc. La narratrice, elle, en lieu et place d'idées toutes faites, voit défiler de simples images, précises et palpables : celle d'un enfant qu'elle ne saurait pas aimer, quelle que soit son identité, et celle d'un écrivain qui perdrait forcément la sienne à l'éduquer. "On ne part pas à la conquête du Graal avec une poussette", écrivait Karen Blixen. Et là où l'expression de la liberté devient intolérable aux yeux des notaires de ce monde exigeant une conversion systématique au modèle de la famille, la narratrice écarte toute forme de dureté, toute prétention à une règle édifiée à d'autres qu'elle-même. Bien au contraire, c'est toute la douceur de son amour qu'elle offre à cet enfant qui n'existera jamais, mais vit sans cesse, à chaque seconde, dans l'imaginaire lumineux de sa conceptrice.
Biographie de l'auteur
Le prix Wepler, décerné l'an dernier à Cronos, a sans doute contribué à mieux faire connaître Linda Lê, l'un de nos plus grands écrivains vivants, que sa discrétion a conduite à bâtir une œuvre monumentale loin des médias. Originaire de Dalat, au Vietnam, Linda Lê éprouve depuis toujours un amour infini pour la langue française et la littérature. Dès Les Evangiles du crime (1992), l'originalité de son style se déploie pour associer une sorte de lucidité immédiate, une vérité rigoureuse et une élégance verbale qui n'appartiennent qu'à elle. Dans chaque roman de Linda Lê se met en scène un combat, personnel ou imaginaire (Les Trois Parques, Les Aubes, Lettre morte), où la sérénité de l'écriture contraste avec la brutalité de la situation. La puissance de son analyse la campe résolument dans le monde contemporain alors que ses intrigues, ses personnages et sa mythologie héritent clairement de sa passion pour la littérature de l'âge classique. Animée d'une liberté intransigeante, Linda Lê aura peu à peu tissé son univers où les thèmes de l'amour et de la mort (In Memoriam) et de la prise de pouvoir (Cronos) se retrouvent ainsi, culminants, dans À l'enfant que je n'aurai pas. Abondamment traduite en anglais, en néerlandais et en portugais, son œuvre a été publiée quasi intégralement par les Editions Christian Bourgois, dont elle est sans nul doute la figure de proue de la littérature française contemporaine.
Mon ressenti
Une très joli lettre adressée à cet enfant qui ne sera pas, faite de tendresse, d’amour que l’auteur nous livre. Linda explique son choix et pourquoi elle n’aura pas d’enfant. Notre société formate nos comportements, une femme qui ne veut pas d’enfant renvoie forcément un truc de l’ordre du pas normal : ne dit on pas que la femme devient plus épanouie ou qu’elle est une vraie femme depuis qu’elle est devenue mère ! … Ce sentiment quand on ne fait pas comme tout le monde, de devoir se justifier face à une décision… et si on devait expliquer les raisons qui ont fait que nous avons des enfants (en enlevant le fameux « j’aime les enfants ») ou pourquoi je suis hétéro et non homo, beaucoup d’entre nous serions bien embêté…
J’ai été touchée par cette lettre : par ses mots, son questionnement, sa remise en cause, son besoin de s’expliquer, la profondeur de ses mots. J’ai été troublée aussi par le fait de la présence / absence de cet enfant… Il est rendu tellement vivant alors qu’il n’existe pas et n’existera pas : une réflexion sincère sur la liberté et l'amour, le couple et l’intime.
A découvrir absolument
Une collection que je ne connaissais pas et j’ai acheté ce livre à cause de la phrase qui présente cette collection : "Quand tout a été dit sans qu'il soit possible de tourner la page, écrire à l'autre devient la seule issue. Mais passer à l'acte est risqué. Ainsi, après avoir rédigé sa Lettre au père, Kafka avait préféré la ranger dans un tiroir. Écrire une lettre, une seule, c'est s'offrir le point final, s'affranchir d'une vieille histoire. La collection « Les Affranchis » fait donc cette demande à ses auteurs : « Écrivez la lettre que vous n'avez jamais écrite. »"
Je trouve que c’est une très belle idée.