Titre: Juste avant
Auteur : Fanny Saintenoy
Editeur : Flammarion
Nombre de pages : 124.
Quatrième de couverture :
Voici un texte qui alterne poésie douce et drôlerie franche. Par la voix d'une très vieille dame sur son lit de mort, et par celle de son arrière-petite-fille, une jeune femme que la vie moderne bouscule, cinq générations parlent. Face aux duretés de la vie, face à la mort qui sème la zizanie, leurs histoires transmettent une gaieté indéfectible. Un premier roman, un récit court qui traverse le siècle, réussite rare de vigueur et de simplicité.
Mon avis :
Ce livre est un premier roman. Bonne nouvelle : il n'est pas rempli de promesses sur l'oeuvre à venir de l'auteur, il est une réussite. J'ai eu même envie de dire "ça ne se voit pas que c'est un premier roman" pour parler avec autant de gouailles que l'héroïne.
Ce roman peut autant se définir par ce qu'il n'est pas que par ce qu'il est. Il n'est pas pesant, il n'est pas larmoyant. La vie de l'héroïne balaie le siècle mais jamais au grand jamais, même dans les temps forts de ce siècle (première guerre mondiale, seconde guerre mondiale, mais aussi première guerre en Irak, dont on parle fort peu, finalement), elle ne sera une pesante reconstitution historique, parce que ceux qui ont vécu ces périodes ne ressentent pas le besoin de détailler le savon qu'ils utilisaient ou les réclames qui couvraient les murs.
Pas larmoyant, certes, mais pas non plus idyllique. Il n'aurait plus manqué qu'au soir de sa vie, Granny, comme l'appelle affectueusement Fanny, la narratrice (l'auteur ?) sombre dans la béatitude la plus profonde et nimbe de rose les heures les plus difficiles et les plus douloureuses de sa vie. Ce qu'elle a vécu, ce qu'elle a souffert, elle s'en souvient. L'injustice de la mort de sa vie. La cruauté des religieuses. L'indifférence de sa mère, femme autoritaire comme il y en avait plus qu'on ne croit en cette période. L'absence des hommes, disparus ou partis. Elle ne croit pas à l'hérédité, pourtant de génération en génération, une femme se retrouve seule avec sa fille unique à élever. Il paraît qu'il faut juste se rendre compte de ce schéma répétitif pour briser la fatalité. Je me demande ce que Fanny penserait de ce jugement.
Bien sûr, en lisant ce livre, j'ai pensé à ma propre aïeule qui elle aussi avait deux filles pendant la première guerre mondiale, un mari au front, revenu blessé lui aussi. J'ai pensé à cette longue chaîne féminine qui m'unit à elle, Geneviève, en passant par ma grand-mère, qui avait 39 ans à la naissance de ma mère. J'ai pensé à mon grand-père qui manifestait en 36 et qui n'est pas allé aussi loin que Louis - n'ai-je pas déjà dit que ma grand-mère avait une forte personnalité et que quand on a cinq filles à élever, on ne s'expose pas exagérément ?
Ce qui se dégage aussi de ce texte est la profonde tendresse entre l'aïeule, mourante, et son arrière-petite-fille. Les deux voix se répondent avec beaucoup de douceur, sans que jamais leur alternance ne paraisse artificielle. Au contraire, j'ai eu l'impression de découvrir comme un contrepoint musical, chant et contre-chant, entre ses deux voix. Les souvenirs et les regrets aussi, pourrai-je dire si le titre n'était déjà pris. Les voyages de Fanny remplacent tous ceux que Granny n'a pu faire - et n'a même pas eu envie de faire. Les photos, ces morceaux de temps arrêtées, sont interprétées différemment par les deux femmes mais l'émotion ressentie est partagée également. Et toujours, cette douceur et cette délicatesse nous rendent les personnages particulièrement attachants.
Juste avant est un livre touchant, délicat, à découvrir absolument.
Auteur : Fanny Saintenoy
Editeur : Flammarion
Nombre de pages : 124.
Quatrième de couverture :
Voici un texte qui alterne poésie douce et drôlerie franche. Par la voix d'une très vieille dame sur son lit de mort, et par celle de son arrière-petite-fille, une jeune femme que la vie moderne bouscule, cinq générations parlent. Face aux duretés de la vie, face à la mort qui sème la zizanie, leurs histoires transmettent une gaieté indéfectible. Un premier roman, un récit court qui traverse le siècle, réussite rare de vigueur et de simplicité.
Mon avis :
Ce livre est un premier roman. Bonne nouvelle : il n'est pas rempli de promesses sur l'oeuvre à venir de l'auteur, il est une réussite. J'ai eu même envie de dire "ça ne se voit pas que c'est un premier roman" pour parler avec autant de gouailles que l'héroïne.
Ce roman peut autant se définir par ce qu'il n'est pas que par ce qu'il est. Il n'est pas pesant, il n'est pas larmoyant. La vie de l'héroïne balaie le siècle mais jamais au grand jamais, même dans les temps forts de ce siècle (première guerre mondiale, seconde guerre mondiale, mais aussi première guerre en Irak, dont on parle fort peu, finalement), elle ne sera une pesante reconstitution historique, parce que ceux qui ont vécu ces périodes ne ressentent pas le besoin de détailler le savon qu'ils utilisaient ou les réclames qui couvraient les murs.
Pas larmoyant, certes, mais pas non plus idyllique. Il n'aurait plus manqué qu'au soir de sa vie, Granny, comme l'appelle affectueusement Fanny, la narratrice (l'auteur ?) sombre dans la béatitude la plus profonde et nimbe de rose les heures les plus difficiles et les plus douloureuses de sa vie. Ce qu'elle a vécu, ce qu'elle a souffert, elle s'en souvient. L'injustice de la mort de sa vie. La cruauté des religieuses. L'indifférence de sa mère, femme autoritaire comme il y en avait plus qu'on ne croit en cette période. L'absence des hommes, disparus ou partis. Elle ne croit pas à l'hérédité, pourtant de génération en génération, une femme se retrouve seule avec sa fille unique à élever. Il paraît qu'il faut juste se rendre compte de ce schéma répétitif pour briser la fatalité. Je me demande ce que Fanny penserait de ce jugement.
Bien sûr, en lisant ce livre, j'ai pensé à ma propre aïeule qui elle aussi avait deux filles pendant la première guerre mondiale, un mari au front, revenu blessé lui aussi. J'ai pensé à cette longue chaîne féminine qui m'unit à elle, Geneviève, en passant par ma grand-mère, qui avait 39 ans à la naissance de ma mère. J'ai pensé à mon grand-père qui manifestait en 36 et qui n'est pas allé aussi loin que Louis - n'ai-je pas déjà dit que ma grand-mère avait une forte personnalité et que quand on a cinq filles à élever, on ne s'expose pas exagérément ?
Ce qui se dégage aussi de ce texte est la profonde tendresse entre l'aïeule, mourante, et son arrière-petite-fille. Les deux voix se répondent avec beaucoup de douceur, sans que jamais leur alternance ne paraisse artificielle. Au contraire, j'ai eu l'impression de découvrir comme un contrepoint musical, chant et contre-chant, entre ses deux voix. Les souvenirs et les regrets aussi, pourrai-je dire si le titre n'était déjà pris. Les voyages de Fanny remplacent tous ceux que Granny n'a pu faire - et n'a même pas eu envie de faire. Les photos, ces morceaux de temps arrêtées, sont interprétées différemment par les deux femmes mais l'émotion ressentie est partagée également. Et toujours, cette douceur et cette délicatesse nous rendent les personnages particulièrement attachants.
Juste avant est un livre touchant, délicat, à découvrir absolument.