Quatrième de couverture :
Chassé du hammam des femmes, je ne me suis pas rué au hammam des hommmes. Dans chaque regard, je ne pouvais m'empêcher de déceler une menace. De penser à mon père. Ou au fquih. Je ne voulais pas qu'ils anéantissent ce qui restait de mon enfance.
Je n'arriverai jamais à me libérer de cette violence. Elle hante mes jours et mes nuits. C'est comme ça. Il faut vivre avec, jusqu'au dernier souffle.
Mon avis :
L'auteur nous raconte la vie d'un enfant d'un petit village du Maroc dans les années 1970 dont l'enfance est marquée par la violence de son père, marchands de chevaux et d'ânes, la méchanceté gratuite d'un oncle, la perversité du fqhir de l'école Coranique, le despostisme et la toute puissance d'un malfrat local.
Dans ce village sans eau ni électricité, ou la pauvreté et la corruption règnent en maîtres, les habitants survivent essentiellement grâce aux trafics de 'kif", de savonnettes françaises, de couvertures espagnoles, d'alcool, de montres japonaises, sans oublier les produits alimentaires.
Les marchandises passaient le plus souvent les frontières à dos d'ânes, si bien que chaque maison y compris la sienne était pourvue d'un immense étable, que Idriss (le nom de notre héros) était obligé de récurer, malgré les morsures et les saletés envoyées par ces animaux, sous les humiliations et les coups de son père, surnommé le Dictateur. Il ne trouve de réconfort qu'auprès de sa mère et sa grand-mère, femmes soumises comme toutes au village, et de Staline appelé ainsi parcequ'il était communiste et homme "lettré".
Lorsque sa tante Rachida l'emmène au hammam des femmes bien qu'il ait déjà 13 ans, il ne peut s'empêcher de contempler à travers l'atmosphère humide, sale, chaude et brumeuse, ses corps dénudés, les petites grenades et les gorges de loup. Il ressent ses premiers émois pour une toute jeune fille de 12 ans et pour un geste déplacé, se retrouve chassé de cet endroit de liberté, ou s'échangent les confidences les plus intimes.
L'histoire prend fin lorsque le père qui avait abandonné la mère et suivi une autre femme en Algérie se retrouve expulsé de ce pays avec 30 000 autres marocains par le Président Boumédienne, en riposte à la Marche Verte lancée par Hassan II.
Plus de contrebande, plus d'argent. Même la pluie se mit à faire défaut. "....Le village se couvrit de poussière et les mendiants proliférèrent...."
Ce livre est plein de sensibilité. Celle de l'enfant et de la femme bafoués et humiliés. La description sensuelle des journées au hammam. La déchéance d'un père violent et du malfrat local tout puissant.