Titre : La jeune fille et la guerre
Editeur : Fayard. Nombre de pages : 320.
Présentation de l'éditeur :
Croatie, 1991. Ana Juric mène une existence paisible avec ses parents, sa petite soeur Rahela et son meilleur ami Luka lorsque la guerre éclate. Au cours d'une expédition en Bosnie pour tenter de faire soigner Rahela, Ana et sa famille tombent dans une embuscade. Seule survivante, Ana apprend le maniement des armes, quitte le pays pour les Etats-Unis et tente de se reconstruire.
Mon avis :
Ce livre est certainement mon premier coup de coeur de cette rentrée littéraire 2016, j’espère qu’il y en aura d’autres. Ce roman en quatre parties nous raconte l’histoire d’Ana, une enfant presque ordinaire. Elle vit dans une famille aimante, mais peu aisée. Sa mère est professeur, corrige fréquemment des copies, son père a des soucis avec son travail, sa petite soeur Rahela, encore un bébé, a des soucis de santé certains. Oui, Ana serait une enfant ordinaire si elle ne grandissait en Yougoslavie, aux premières heures de la guerre qui déchira le pays. C’est sa voix que l’on entend, son quotidien. Elle mène une vie libre, sans entrave, joue avec Luka, son meilleur ami, sort pour faire les courses des adultes (des cigarettes !), s’habille en garçon non parce que ses parents en voulaient un, mais parce qu’ils n’ont pas les moyens de lui en acheter. Et le quotidien de la guerre n’est pas sans rappeler, pour ceux qui en ont lu les récits, celui de la seconde guerre mondiale : les alertes, les décentes dans les abris, les restrictions.
La différence, majeure, est que l’ennemi était intérieur, et que l’aide extérieur tarda à venir. Les journalistes étaient là, oui, et Ana ne les épargne pas dans ses commentaires. Les américains non plus. Là où d’autres leur reprochent de se considérer comme les sauveurs du monde, Ana, qui a grandi, leur reproche surtout de ne rien avoir fait, pas plus que l’ONU d’ailleurs.
Certains pourraient se plaindre parce que l’on sait, dès que la quatrième de couverture (et dès le début de la seconde partie) qu’Ana a survécu à la guerre. Il nous reste cependant à savoir comment elle a pu survivre, et comment elle parvient à (re) vivre. L’auteur aurait pu choisir de laisser l’imagination du lecteur combler l’ellipse entre la première et la seconde partie. Non, la troisième partie permet de découvrir ce que fut la vie d’Ana juste avant son départ pour les Etats-Unis, une partie qui permet de découvrir une réalité dont on a peu parler, lors de cette guerre qui était si proche de nous. J’ai aimé la façon dont le récit était raconté, de façon précise, sans volonté de surenchérir sur les descriptions. Ce que nous voyons (les mots font vraiment naître des images) suffit. Pas non plus d’analyse démesurément longue du ressenti d’Ana pendant ou après. ce qu’elle ressent, a ressenti, nous sera livré de manière simple, direct. Ana a parcouru un long chemin – mentalement. Elle en parcourt un autre – physiquement – pour son retour au pays natal. Cette réalité-là n’est pas montré souvent non plus, la reconstruction, le souvenir, al vie d’après pour ceux qui ont survécu et doivent vivre avec ou sans.
La jeune fille et la guerre est un livre sur le souvenir et sur la reconstruction, de pays et des êtres qui y vivent.