Une question de temps
Edition Gallmeister - 336 pages
Présentation de l’éditeur :
Depuis le tragique accident qui a brutalement mis fin à son enfance, Alice, vingt-et-un ans, erre de ville en ville, de bar en bar, noyant sa culpabilité dans l’alcool, armée d’un casier judiciaire avec mention et d’une échelle de un à cinq pour qualifier ses gueules de bois quotidiennes. Un matin des plus banals, elle émerge d’un sommeil comateux et cherche déjà à se remplir un verre… lorsqu’elle découvre un type mort allongé à côté d’elle et un sac rempli de drogue et d’argent à ses pieds. À quelque chose malheur est bon : Alice s’enfuit avec le magot. Mais le légitime propriétaire du butin, peu enclin au partage, ne tarde pas à se lancer à ses trousses. Entre la jeune fille et le truand, une course poursuite s’engage sur les routes des États-Unis, et tout n’est alors plus qu’une question de temps.
Mon avis :
Je vous comprendrai parfaitement si vous n’avez pas envie de lire ce livre. Je ne vous dirai pas que vous êtes trop sensible – sur le sujet qui nous est présenté, on n’est jamais trop sensible, tant que notre sensibilité, dans la vie, nous pousse à faire ce que l’on a à faire.
Dans ce livre, il est question d’enfants en souffrance. Alice a beau avoir 21 ans, elle fait partie de cette catégorie. Ce n’est pas qu’on ne lui a pas pardonné ce qui s’est produit, c’est elle-même qui ne peut pas se pardonner ce qui est arrivé, alors que ce qui s’est passé était un accident. Depuis, elle erre, emportant avec elle son mal-être profond, qu’elle soigne (déjà) à coup de gueule de bois. Partir avant d’être retrouvée. Partir avant de s’être attachée – parce qu’elle a tout de même fait une belle rencontre dans sa vie, quelqu’un qui se reproche, aussi, ce qu’il n’a pas fait – pour elle.
Alice s’est trouvée au mauvais endroit au mauvais moment – parce qu’elle avait fait des mauvais choix, des mauvais choix banals, que n’importe qui pourrait faire, finalement.
Ce n’est pas tant une course poursuite qui commence, entre elle et celui qui cherche à reprendre son bien, c’est comme une ultime étape pour se retrouver elle-même, pour faire la paix avec elle. Elle traverse quatre états, oui, mais ce n’est pas une fuite, c’est une quête, presque pour reprendre sa vie là où elle l’avait arrêté quelques années plus tôt.
Seulement… elle n’avait pas prévu de prendre une gamine sous son aile. Une gamine qui en a tellement bavé qu’on peut se demander ce que font les services sociaux. Ah, pardon, ils ont d’autres chats à fouetter tout en étant débordé. Une gamine qui en a tellement vu qu’elle pourrait avoir 80 ans ou, comme diraient mes élèves, qu’elle est « au bout de sa vie ». Alice ne sait même pas pourquoi, au juste, elle se met à la protéger. Elle le comprendra, à un moment. Elle finit par écouter sa sensibilité, qu’elle avait endormi pour mieux survivre.
Je ne vous ai pas parlé de son adversaire. Ce n’est pas qu’il ne soit pas intéressant. Il n’est pas un adversaire vide, creux, pas un épouvantail. Il est lui aussi un enfant victime de maltraitance alors que, aux yeux du monde, il avait une famille qui semblait aimante et soucieuse de son développement intellectuel. Les émotions ? On oublie ! On oublie bien d’autres choses, également.
Je n’ai garde d’oublier les personnages secondaires. Même pour une brève apparition, ils sont soigneusement caractérisés. L’occasion pour eux de devenir des héros, pour quelques pages – ou pour se montre un lâche ordinaire.
Une question de temps, un roman pas si facile à lire. Il faut franchir le cap. J’ai moi-même reposé le livre un certain temps avant de parvenir à le terminer. Certaines questions restent sans réponse. Espérons le meilleur pour Alice, un personnage attachant entre tous.