Engrenages et sortilèges
Edition Rageot - 480 pages.
Présentation de l’éditeur :
Grise et Cyrus sont élèves à la prestigieuse Académie des Sciences Occultes et Mécaniques de Celumbre. Une nuit, l’apprentie mécanicienne et le jeune mage échappent de justesse à un enlèvement. Alors qu’ils se détestent, ils doivent fuir ensemble et chercher refuge dans les Rets, sinistre quartier aux mains des voleurs et des assassins. S’ils veulent survivre, les deux adolescents n’ont d’autre choix que de faire alliance…
Mon avis :
Ce livre est un véritable coup de coeur ! Déjà, point très positif, l’aventure est mise en place et trouve sa résolution en un seul et même volume. Pas besoin d’attendre un tome 2 (ou un tome 5….) pour savoir comment la situation va se dénouer. Ensuite, l’on trouve dans ce roman des femmes, des hommes, des filles, des garçons, qui ne sont pas forcément dans les rôles que la société traditionnelle (la nôtre, si vous préférez) leur assigne d’habitude – s’il est encore des personnes que cela fait grincer des dents, merci de passer votre chemin. Ainsi, Grise est une future ingénieur alors que Cyrus étudie pour être magicien. Sa mère est une chef militaire connue et reconnue, personne ne remettrait en cause son statut, son aura – même si son fils pense qu’elle est une mère distante, indifférente, plus préoccupée de stratégie militaire que de sa progéniture.
Sinon, la société est très hiérarchisée. Le harcèlement entre étudiant de l’académie ? Un mode de vie puisqu’il ne faut pas abîmer l’égo des futurs magiciens, à moins d’être leurs professeurs : là, on a le droit de le réduire en miettes ! Cyrus est trop lucide pour ne pas s’en rendre compte, il faut simplement que son enseignement lui laisse le temps de se poser. Il peut compter sur Quint, son familier, celui qui l’aide à augmenter ses forces magiques, parce que Quint a une immense lucidité : – Pour répondre à ta question, les magiciens ont généralement un caractère épouvantable, expliqua le chat avec sérieux. Ils ont donc tendance à rester souvent tout seuls, puisque personne ne les supporte. Alors pour éviter de devenir fous, ils enchantent leurs animaux de compagnie, histoire d’avoir quelqu’un à qui parler.
Le temps de se questionner, ou l’envie de se questionner, c’est ce qui manque à certains habitants de l’empire de Mycée. Oui, ils ont remporté des victoires – que sont devenus les habitants des pays qu’ils ont vaincu ? Des réfugiés, qui font ceux qu’ils peuvent pour survivre. Même combat, si j’ose dire, pour les habitants de Mycée qui ne font pas partie de l’élite et qui doivent trouver des moyens de survivre, invisibles, écrasés par les impôts, ayant envie de changements, d’une société meilleure pour tous.
Grise et Cyrus vont être amenés à se poser des questions, et à agir, parce qu’ils se retrouvent bien malgré eux au milieu d’un complot qui ne les concerne pas – enjeu involontaire pour faire ployer leurs proches. Eux ont encore des scrupules, ils ont encore confiance, surtout Grise, en leur prochain – Cyrus, nettement moins, le cynisme, c’est utile pour la survie, et la cour des Miracles dans laquelle ils se réfugient, dirigée par une charismatique chef, est bien moins dangereuse que la cour impériale.
L’action est menée tambour battant, et pourtant le lecteur n’a jamais l’impression qu’elle va trop vite. Il faut dire qu’elle rend leur visibilité à des personnes que l’on ne voulait pas voir. N’est pas un sujet d’actualité ? Il est question aussi de transmission des savoirs, à l’heure où l’on décide que telle ou telle matière est moins importante que les autres. N’est-ce pas aussi un sujet d’actualité, alors que tant de personnes ont des savoirs à transmettre ? Quelle société veut-on vraiment, pas seulement pour nos enfants, mais pour nous ? Même si nous sommes dans un univers de fantasy parfaitement construit, ces questions ne peuvent que trouver une résonance chez le lecteur.
Un très beau roman à partager.
Dernière édition par Nina le Mer 30 Jan 2019 - 20:33, édité 1 fois