Allegheny River
Edition Albin Michel - 275 pages
Présentation de l’éditeur :
Avec Le Miel du lion, un roman salué par la critique, Matthew Neill Null avait apporté la preuve de son incroyable talent pour saisir le monde sauvage et interroger notre rapport à l’environnement.
Dans Allegheny River, animaux et humains cohabitent au fil du temps, dans un équilibre précaire, au sein d’une nature ravagée par la main de l’homme. Tour à tour épique et intimiste, c’est un univers de violence et de majesté qui prend vie sous la plume lyrique de ce jeune écrivain.
Mon avis :
Allegheny River est un recueil de nouvelles, et ce premier constat est presque réducteur. En effet, chacun de ses neuf textes crée véritablement un univers complet, riche, parfaitement construit et autonome. Ces neuf nouvelles sont autant de morceaux d’une mosaïque qui nous parle de la Virginie Occidentale, cet état qui a fait sécession avec la Virginie pendant une certaine guerre, et des rapports entre la nature et l’homme.
Elle reprend souvent ses droits, la nature, il ne faudrait pas l’oublier, y compris quand l’homme est presque sûr de l’avoir canalisée. Cela pourrait être presque drôle – presque – quand, dans Ressources naturelles, l’on découvre comment la population d’ours est géré, et comment certains oublient que l’ours est avant tout… et bien un animal sauvage. Presque bien sûr, parce qu’il s’agit avant tout de montrer que l’homme est incapable de protéger ces espèces menacées. Il y a des règles, il y a des lois, il y a aussi des sanctions prévues pour ceux qui s’en prendraient à des espèces protégées. Mais les hommes, dans ce monde rural, quasiment loin de tout, ont toujours vécu ainsi, et essayeront de vivre ainsi – tant pis pour les sanctions. L’auteur ne juge pas ces personnages, d’ailleurs, j’ai même l’impression qu’il éprouve de la tendresse pour ceux qui, comme beaucoup, essaient avant tout de survivre.
La nature, et surtout l’Allegheny, cette rivière qui rythme la vie, qui fait montre de sa force comme dans « La saison de la Gauley ». Dans cette nouvelle, ce sont les sportifs qui l’exploitent, s’offrant, en la descendant, quelques minutes de grands frissons qui peuvent tourner au drame et changer le cours de toute une vie. Dans « L’île au milieu de la grande rivière », elle isole ceux qui ont été mis à l’écart de la société, par risque de contagion, sans penser à ce que ces personnes, définitivement bannies, même en vie, du monde des vivants, pourraient ressentir. Cette nouvelle, d’ailleurs, n’épouse pas leur point de vue, mais celle d’un jeune garçon curieux, qui brave les interdits sans songer aux risques Dans « La lente bascule du temps », nous voyons des hommes au travail, au rythme des troncs d’arbre que la rivière charrie, avec Sarsen et Henry. Peut-être la nouvelle que j’ai préféré dans ce recueil, par l’émotion qu’elle dégage.
En terminant cet avis, que j’ai mis beaucoup trop de temps à rédiger, je m’aperçois que j’ai peu évoqué la somptuosité des descriptions, leur puissance évocatrice, que le récit se passe dans le présent ou dans le passé. Alors, après Allegheny River, il est évident que je vais me plonger très vite dans Le miel du lion, son premier roman.