La femme en vert.
Editions Points. 348 pages.
Mon avis :
La femme en vert est un des plus beaux romans policiers que j'ai lu. D'abord, grâce à son enquêteur, Erlendur. Sous ses dehors frustes se cache un homme d'une profonde sensibilité, un humaniste en somme. Eilenborg, son adjointe, n'est pas en reste, et ne ménage pas sa peine. J'aime nettement moins Sigurdur Oli, hautement désagréable, incapable de s'engager, et incapable de montrer un peu de compassion lors de l'enquête. Sa tête est farcie de clichés et il est incapable de passer outre.
Le lecteur vit le temps de l'enquête en même temps que les trois enquêteurs. Aucune étape de la lente exhumation. du corps n'est passé sous silence. Les enquêteurs ne restent pas inactifs, et nous suivons pas à pas leur minutieuse recherche pour découvrir, avant même de pouvoir poser un nom sur le cadavre, qui pouvait bien vivre à cet endroit, nous racontant ainsi comment la seconde guerre mondiale a été vécue en Islande. Si la lenteur exagétrée peut agacer au point qu'Erlendur s'en plaint parfois, (autant dire que le lecteur se sent moins seul), il est le premier à reconnaître que la précipitation est mauvaise conseillère.
Parallèlement à ce récit principal, nous découvrons la vie de Margareth et de ses trois enfants, Mikkelina, handicapée, Simon et Tomas. Margareth est mariée à Grimur, un monstre. La femme en vert explore les souffrances psychologiques qu'un être humain est capable d'infliger à un autre être humain. Le mécanisme d'assujetissement est finement observé, les scènes sont à la limite de l'insoutenable tant je me suis sentie en empathie avec Margareth et ses enfants. Ces scènes sont d'autant plus angoissantes que le lecteur, en avance sur les enquêteurs, craint que le corps retrouvé n'appartienne à un membre de leur famille.
Et le passé rejoint le présent quand apparaît la femme en vert. Des drames qu'Erlendur met à jour de cette époque troublée de la seconde guerre mondiale, restent trois survivantes, trois femmes qui ne se connaissent pas mais qui chacune a vécu avec un secret, différent. Si, pour l'une d'entre elles, le secret l'a rongé et lui a fait bâtir sa vie sur un mensonge, pour l'autre, qui porte la couleur de l'espoir, je suis heureuse qu'elle est vécue avec ce secret (et non contre), et qu'elle ait réussi à reconstruire sa vie.
Comme si le roman n'était pas déjà assez émouvant, nous en apprenons un peu plus sur la vie personnel d'Erlendur . Au chevet de sa fille, plongée dans le comas, il lui parle, de son mariage, de sa relation avec leur mère, de ce que, peut-être, il aurait dû faire pour ne pas être séparé d'eux. Surtout, au détour d'un couloir, une rencontre nous révèle, avec infiniment de tact, un fait poignant qui éclaire en partie la personnalité d'Erlendur. Je ne crois pas me tromper en pensant qu'il en sera à nouveau question dans le prochain tome, que j'ai hâte de lire.