Cet été-là, de braise et de cendres.
Edition Fayard - 256 pages.
Présentation de l’éditeur :
Alain Vircondelet signe ici le premier roman qui met en scène Marguerite Duras.
Il raconte la naissance de l’écrivain, au sortir de la guerre, au cours de l’été 1945. Elle séjourne auprès de son mari, Robert Antelme, en convalescence en Haute-Savoie, revenu depuis quelques semaines seulement des camps. Dionys, son amant, les rejoint. Ce n’est plus la guerre et c’est encore la guerre. Hiroshima, Nagasaki, les derniers combats. La solitude et la douleur. Comment renouer avec la paix, et surtout écrire ? L’écriture est, pour elle, la vie, « rien de plus sauf elle, la vie »
Mon avis :
Il est fréquent de faire d’un personnage historique, voire d’un romancier, un personnage de romans. Je pense notamment à ces romans policiers qui transforment des écrivains connus en enquêteurs, comme dans la série des Oscar Wilde de Gyles Brandeth. La situation est différente ici puisqu’il ne prétend pas transformer Duras en personnage, mais révéler un pan de la vie du personnage Duras. Ce livre a été écrit par un spécialiste de Marguerite Duras, plus encore devrais-je dire, par un passionné de l’écriture de Marguerite Duras, de la femme qu’elle a été. Il suffit de lire pour cela l’imposante biographie finale. Il suffit aussi de lire ce livre, qui ne sombre pas dans l’écueil de l’anticipation.
Duras avant Duras, Duras et ses contradictions, Duras pendant la guerre, quand celui qui était alors son mari fut déporté puis revint, avant de revenir à la vie, alors qu’elle-même était amoureuse d’un autre homme. Les pièges de l’anticipation sont évités. Même si le lecteur sait que cette jeune femme deviendra une des plus grandes écrivains du XXe siècle, il n’est pas fait allusion aux oeuvres futures, aux succès, aux amours non plus. Mais il parle des circonstances qui ont fait naître le désir d’écrire, le désir d’écrire autrement, des compromissions aussi que Marguerite fit pour être publiée. Nous voyons l’oeuvre de Duras en 2016, nous avons oublié qu’être publié pendant la guerre, ou juste après la guerre nécessitait des compromissions (avec l’ennemi), du matériel (pourquoi user du papier pour une écrivain inconnue ?) ou entraînait des prises de risques importantes. Marguerite fréquenta collaborateurs et résistants, cherchant à savoir ce qu’il était advenu de son mari, le retrouvant presque par le fait du hasard.
Le rythme est lent, comme est lent le retour à la vie de ceux qui sont revenus, de Robert. Les descriptions de la campagne montre que la nature est toujours là, belle, apaisante. La guerre n’est pas terminé pour autant, l’épuration débute, les bombardements se poursuivent, ailleurs.
Cet été-là, de cendre et de braises offre un éclairage romanesque sur les premières années d’écrivain de Marguerite Duras. Je pense cependant qu’il touchera essentiellement les passionnés de l’oeuvre de Duras.